Daniel Bolshoy est un homme avec une mission : il est impossible d’avoir une conversation avec ce musicien de 35 ans sans percevoir qu’il se fait le champion passionné et passionnant de la musique en général et de la guitare classique en particulier. En plus de sa brillante carrière internationale et des éloges pour « son intelligence accomplie et sa prouesse technique » (Toronto Star), Daniel a d’autres raisons d’être enthousiasmé ces temps-ci. En effet, il débute comme Chef du département de guitare à la toute nouvelle Vancouver Symphony Orchestra School of Music. De plus, ATMA Classique vient de lancer son premier disque, Soñando Caminos, entièrement consacré à la musique du compositeur espagnol du XXe siècle Eduardo Sainz de la Maza.
Daniel Bolshoy est né à Moscou et a déménagé avec sa famille en Israël lorsqu’il avait 3 ans. Dès 7 ans, il dut endurer des cours de piano pendant quatre ans avant d’arriver à convaincre ses parents à le laisser changer pour la guitare.
Ses raisons pour avoir choisi la guitare? « À cet âge-là, nous confie-t-il, je commençais à remarquer les filles et j’ai pensé : “hé! voilà un bien meilleur instrument pour les attirer!” Je ne voulais pas être le gars caché dans un racoin en train de triturer un piano; je voulais plutôt être le type dans le corridor grattant quelques accords et flirtant avec les filles. »
Heureusement pour les mélomanes, les motivations adolescentes de Daniel Bolshoy ont fait place à un engagement plus sérieux lorsqu’il s’est inscrit à l’Académie des arts et des sciences de Jérusalem. « Plusieurs à cette école étaient des musiciens classiques de haut niveau, et je me suis pris d’amitié pour eux. Dès que j’ai pu mesurer le niveau de leur passion et de leur engagement, il est devenu bien plus facile pour moi d’accéder à ce monde. C’est alors que j’ai décidé que la guitare classique, c’était pour moi », nous apprend-il. « Malgré mes motivations d’autrefois, je suis devenu beaucoup plus nerd que prévu! J’ai fini par me cloîtrer pendant des heures dans un studio de pratique et j’ai découvert que je pouvais avoir une attitude très sérieuse et résolue face à la guitare. » La famille de Daniel a fini par déménager à Ottawa. Il y fréquentera dès l’âge de 17 ans la Canterbury High School, une école à vocation artistique où l’on compte parmi les anciens élèves des membres du groupe Arcade Fire.
Daniel pense-t-il que les guitaristes classiques ont plus de difficulté que d’autres à établir une solide réputation de virtuose au sein du monde de la musique classique? « C’est une drôle de situation », nous dit-il. « Le monde de la musique classique est déjà bien petit et à l’intérieur de ce petit monde il existe l’idée reçue que la guitare appartient au monde de la musique populaire. Mais une fois que les gens prennent la peine de se déplacer pour un concert de guitare classique, ils entendent que c’est effectivement beau, romantique et intime, mais ils s’aperçoivent aussi que l’instrument est immensément exigeant et possède un répertoire vraiment intéressant. Les compositeurs aiment beaucoup la guitare parce qu’elle dispose d’une très grande palette de couleurs. Les compositeurs du XXe siècle ont vraiment découvert l’instrument; il n’y qu’à considérer Nocturnal de Benjamin Britten, ou l’œuvre de Tekemitsu, qui a écrit tant de grande et bonne musique pour la guitare. »
Au moment d’écrire ces lignes, Daniel venait tout juste de prendre poste à la nouvelle école du VSO. « L’école est vraiment incroyable et la salle de concert est à la fine pointe. Tout dans l’école a été conçu dans le but de faire et d’enseigner la musique. Je suis vraiment heureux d’en faire partie », dit-il. Il était tout particulièrement enthousiasmé par la nouvelle salle de concert de l’école, sise au centre-ville de Vancouver tout près de l’Orpheum. D’ailleurs, Daniel sera le premier artiste à présenter un récital solo dans Pyatt Hall. Ce concert du 1er octobre sera aussi l’occasion du lancement de son nouveau disque.
En plus des concerts qu’il donnera dans la région de Vancouver, Daniel Bolshoy se produira à Whitehorse en octobre et en Israël en juin 2012. Il retourne à Tel-Aviv à l’invitation du Israel Chamber Orchestra, où l’ensemble lui a donné carte blanche pour le choix du programme : le Concierto de Aranjuez de Rodrigo et un concerto du compositeur mexicain Manuel Ponce.
Contrairement à bien des musiciens pour qui les voyages continuels sont un mal nécessaire, Daniel adore ces déplacements et se réjouit de pouvoir profiter des richesses des villes qu’il visite. Le format pratique de son instrument et son timbre relativement doux lui permettent de pratiquer presque partout. « Je peux pratiquer dans plein d’endroits, même dans les aéroports. Il m’est arrivé de me faire avancer en première classe parce que des employés de la compagnie aérienne m’avaient entendu pratiquer dans le salon de l’aéroport. Il y a bien parfois des avantages à pouvoir se déplacer partout avec son instrument! »
© Luisa Trisi, septembre 2011
Traduction : Jacques-André Houle